atelier d’écriture

Entendre et libérer sa Muse-Ique » Jour 1 hier à l’Institut Français de Douala.
 » Madame, je ne venais pas ici pour ça! » l’apprenante Mpessa, me fustige du regard, les larmes plein les yeux.
 » C’est inattendu. Je ne m’attendais pas à ça! » Murmure Germaine, le corps encore sous le choc.
Pieds nus, tel que je le leur ai demandé, les apprenants découvraient interloqués, qu’ils devaient réveiller celui ou celle qu’ils ont fui depuis des decennies, certains depuis 30 ans…
 » Madame, ça fait 30 ans que je n’ai plus pensé à cette image, et elle revient aujourd’hui… mince! »
… Celui ou celle qui pourant détient bien gardé avec lui/ elle, le génie littéraire auquel ils aspirent: l’enfant en eux, entre 3 et 7 ans.
 » Merci madame, je réalise que j’en avais besoin. Vraiment c’est inattendu. Je reviens demain. » Me promet Mpessa à la fin de la séance.
Jour 2 c’est aujourd’hui à 16h piles à l’Institut Français de Douala.
Venez tels que vous êtes, et repartez tels que vous ne souhaiteriez plus jamais vous perdre.

… « Ecouter la nature », tel est le thème que j’avais choisi…
Avec les enfants, nous sommes allés hors de la bibliothèque et là, dehors, nous avons  » écouté » 03 creuseurs de sable occupés à leur besogne… nous avons « écouté » un petit garçon d’une dizaine d’années plongé un peu plus loin dans un atelier de menuiserie… nous avons  » écouté » une vieille maison recouverte de haillons… et à chacun, nous avons inventé une histoire… un passé… un futur… un destin… et leur quartier Oyack à leurs yeux, s’est soudain métamorphosé en une caverne étincelante de diamants…
Ces enfants ont juste soif de la Beauté d’un Univers qu’on ne leur offre pas…

…  » Capturer l’instant »… tel a été le thème qui m’est venu spontanément à l’esprit, lorsque les proviseurs des lycées bilingues de Nylon-Brazzaville et de Ndogpassi m’ont sollicitée, pour entretenir simultanément 60 élèves de leurs sections anglophone et francophone…
Comment saisir  » la musique » d’un instant…?  » le souffle » fugace de la Muse…? Comment opérer une sorte de capture d’écran psychique et même spirituel, sur l’inspiration d’une seconde… avant qu’elle ne s’envole…? Et qu’elle ne soit plus qu’une folie dont on se moque en nous-mêmes, lorsqu’on est bien vite rattrapé par le monde réel qui nous entoure…
Comment immortaliser un moment furtif de Transfiguration…?
… L’atelier était prévu de 13h à 15h… il s’est achevé à 18h… je m’enfuyais en courant vers ma voiture, les élèves à mes trousses et leurs professeurs riant aux éclats.
… Ces jeunes ont simplement soif de la Beauté d’un Univers qu’on ne leur offre pas…

Un écrivain, qu’est-ce que c’est… On dit que c’est devant des enfants qu’on apprend réellement à l’être…
Ce qui attendait Jasmine le vendredi 7 juillet 2023 à Ahala, dans la bibliothèque Afidi, demandait d’être plus qu’une main produisant des textes…

Ouvrir un livre et oublier que c’en est un pour mieux le vivre, ainsi s’est penchée Danielle Eyango sur le thème qui a rassemblé des passionnés qu’on peut dire inattendus… Les enfants et les passionnés primaires ont des préoccupations auxquelles seul l’authentique sait répondre… Et l’auteure, face au public, s’est montrée digne des espoirs présents…

De l’art de s’écouter à celui de s’abandonner à l’âme des autres, Danielle Eyango a exposé avec des mots sans artifice une expérience unique qui s’est tout de suite muée en expérience plurielle…
Lire, oui… mais comment, pour réussir à proposer une écriture crédible… << La jeunesse a pour péché l’indiscipline >>… Les lignes proposées par la commise de Jasmine et la lecture qu’elle a offerte pour clôturer l’atelier ont ému aux silencieuses larmes, nous rappelant les premières rencontres des lecteurs avec « Le parfum de ma mère »… Se vider pour se ressourcer…

Jasmine, ta présence a mené l’atelier à une profondeur où seules les racines se font entendre… Le Livre s’offre alors à l’auteur rajeuni, et lui indique la voie du regard… Écrire se propose au niveau du potentiel de l’auteur que celui-ci assume sans complexe ni prétention…
L’intensité de l’heure passée avec ces jeunes a ouvert une nouvelle porte à l’auteure qui elle-même ne cesse d’apprendre…

Être écrivain, c’est surtout cela…

<< Ecrire ne suffit pas, même quand on sait le faire… Les enfants ont des questions pas possibles, trop difficiles si un auteur ne partage pas d’intimité avec son écriture >>… nous confie ta descendante, Jasmine, avant de s’évaporer pour Douala…

Les histoires sont les mêmes, c’est l’écriture qui change…

Ray NDÉBI

❤… Donc, je vous disais qu’avec les enfants, nous allons décrypter les rires et les larmes invisibles qu’ils avaient déjà inscrit dans l’Air du Temps… Vous avez sans doute cru à une simple beauté langagière… Il n’en était rien. Apprenez que mes beautés langagières sont pure Mathématique, c’est-à-dire qu’elles reposent toujours sur une vérité pensée et vécue, que la Muse revêt simplement d’un lyrisme poétique.

Hier, avec les enfants de la bibliothèque AFIDI à Yaoundé, nous avons fait 3 petits jeux:

1) Sur une feuille blanche, chaque enfant doit donner une couleur ou des couleurs à sa vie, et dessiner tout ce qui lui passait à l’esprit.

2) ■ Des petits ballons à souffler de toutes les couleurs leur sont ensuite présentés. Le ballon représente le rêve ou le souhait le plus profond du coeur… Ils choisissent alors chacun librement un ballon, et y soufflent de toutes leurs forces, puis ils l’attachent avec une ficelle pour qu’il vole dans l’air.
■ Toujours sur mes instructions, les enfants lâchent leurs ballons dans l’air… Ils ont eu du mal à les lâcher et je m’y attendais ( sourire)… Puis, à mon ordre, ils attrapent de nouveau leurs ballons, leurs rêves… J’ai fait répéter le manège 3 fois de suite. Et à chaque fois, ils ont eu du mal à lâcher leurs ballons…

3) ■ Les enfants tiennent dans une main l’image de leur vie actuelle qu’ils ont eux-même dessinée, et dans l’autre main, ils tiennent leurs ballons… Sur mon instruction, ils fixent tour à tour le dessin et le ballon et vice versa.

■ Je leur donne alors une nouvelle feuille vierge, et je demande à chaque enfant de s’écrire une lettre à lui-même…

Dans un silence total et surprenant, ils se mettent alors à écrire tandis que je rythme le silence d’une chanson de Maternelle… ( Non pas, par pure envie de chanter…). Les textes jaillis de cet atelier étaient alors d’une beauté et d’une authenticité pure. Ils se sont écrit à eux mêmes leurs peines et leurs combats, et ils se sont promis de réaliser chacun leur rêve.

Je leur ai demandé de coller au mur de leur chambre, celui qui leur fait face quand ils se réveillent le matin, la lettre à eux- mêmes et juste à côté, le ballon volant…

N.B: Si vous êtes  » fake » en faisant un tel exercice, c’est-à-dire que vous le faites juste pour en mettre plein la vue… Les enfants le ressentiront et leurs textes seront vides et creux. Vous n’aurez en rien marqué leur vie… Excepté, si tel n’est même pas votre intérêt… Ces ballons, ils les jetteront à la poubelle ensuite ou les perdront…

Hier, à la fin de l’atelier, une petite fille a couru au robinet pour laver son ballon, avec beaucoup de délicatesse et des étoiles plein les yeux… » C’est mon rêve! Un rêve c’est précieux! » Disait-elle… ❤

Et Jasmine arrive à La Maison des Savoirs de Yaoundé le 06 juillet 2023… Cette bibliothèque désormais notre Maison… Les attentes sont aussi nombreuses que les participants… « Écrire l’Afrique »… Un appel qu’il est pénible d’ignorer… L’écriture naturelle est de nouveau le sujet d’un atelier que nous partageons…

Le soir descend plus vite que l’horloge, alors que nous entamons le chemin suivi par Jasmine vers les voies les plus reculées de l’âme… « Qu’est-ce que l’Afrique »… Voilà comment notre regard s’est posé sur le thème du jour… Bien loin d’une cause, l’Afrique est divine… À chaque particule de l’univers, elle insuffle l’éternité…

La grande préoccupation est la difficulté à sortir de la cage confortable des théories et des gloires mortelles… L’idée que les jeunes se font de la Littérature et du Livre les éloigne de leur intimité avec la plume… Face à un objet, l’auteur s’émeut de la peinture, surtout selon le sens que lui donnent les hommes, et s’en va, oubliant d’écrire…

L’Afrique des rumeurs est une caricature du paysage qui limite à une surface traîtresse et vaporeuse le regard de l’auteur…
L’Afrique des savants et des conquérants est un objet avec un corps gracieux et un esprit embrumé…
L’Afrique, celle que Danielle partage avec le public, a un parfum de terre et un goût de racine…
L’Afrique de la Littérature est infinie, sans frontière…

Arrivés au cœur de l’Afrique, là où bat son tam-tam le plus authentique, nous sommes investis de questions nouvelles… au siège de l’âme de l’auteur…

L’Afrique est celui qui l’est…

L’Afrique est la condition de sa plume…

Ray NDÉBI

Les cafés littéraires avec les enfants m’ont toujours laissée un goût aigre. Non pas dans un sens péjoratif, mais en ce sens que j’ai toujours l’impression de n’avoir pas donné assez, tellement ils savent être intéressants.

Mais quelle imagination !

Mais quelle claque !

Ils avaient lu Le parfum de ma mère et ce 19 mars 2021, en avaient fait ce qu’ils voulaient : dessins, réécriture… Ils se sont lâchés.

Des moments pareils doivent absolument être vécus par tous les écrivains.